ETHIOPIE VTPC de BURRAYOU
EXTRAITS du Rapport de Voyage d’octobre 2022
de Maria Richet Jean François Gillet , Françoise Goethals ( présidente, trésorier, et secrétaire des ENFANTS DU TOUKOUL), Béatrice Bergeron et Sylvie Brisson ( Passerelle )
Nouvelles éthiopiennes
1€ =53 etb
1 litre d’essence ou de gazole =60etb=1.15€
Le kilo de teff est passé de 25etb à 63 birrs à Addis. Le litre d’essence est passé à plus d’un euro le litre ce qui influe fortement sur la hausse de tous les prix puisque tout est transporté par la route ici.
La saison des pluies n’est pas encore terminée, les cultures sont déjà bien avancées autour de Bahar Dar, le teff est prêt à être récolté, le riz également.
L’activité économique semble normale, le gouvernement continue ses actions de développement dans les territoires comme à Addis.
A Bahar Dar, ils sont en train de finaliser un deuxième pont au-dessus du Nil.
Depuis le démarrage du grand barrage, il y a beaucoup moins de coupures de courant.
Dans Addis, les travaux de voirie continuent pour désenclaver les quartiers
L’aéroport de Bole a encore doublé, il n’y a que le nombre de pistes qui est resté inchangé. Boeing vient d’y installer un centre de maintenance des avions opérant en Afrique en plus de son centre de formation des pilotes.
Les routes du nord n’étant pas sûres en région Oromo, le trafic aérien régional s’est fortement développé et il y a 12 vols par jour entre Bahar Dar et Addis ).
Lalibela est de nouveau accessible et des touristes y sont allés récemment.
Le sud était toujours resté ouvert.
Il y a des tensions dans toutes les zones frontières inter ethniques.
Nos diverses rencontres avec le directeur, le staff et les jeunes du VTPC de Burrayou
Première rencontre avec Tamiru ce mercredi 12/10/2022, nous attaquons tout de suite après les retrouvailles d’usage, je le trouve en forme avec pas mal d’énergie.
Il m’informe qu’il y a maintenant 204 enfants au total dont 63 à l’orphelinat
Les jeunes sont globalement effrayés et découragés par la guerre. Aucun n’a souhaité s’enrôler, deux anciens du VTPC y sont partis, l’un dans l’armée (il a été blessé) et l’autre dans la police fédérale.
25 jeunes sont en attente de job, 12 ont quitté le VTPC en un an ce qui est peu.
La situation économique est très défavorable ; les entreprises ont licencié du monde pendant la période Covid mais doivent les réembaucher en priorité au redémarrage des activités.
Pour chaque opportunité d’emploi, le VTPC essaie de présenter cinq jeunes. Le gouvernement ne créé plus d’emploi et met toutes ses forces et moyens dans l’effort de guerre dans le nord. Nous allons essayer de faire venir des coachs extérieurs pour préparer les jeunes à la recherche d’emploi, au passage des entretiens et surtout qu’ils prennent un peu la confiance dans leurs capacités.
J’interroge Etaferahu qui est une ancienne du VTPC , sur la difficulté des jeunes HIV à trouver du travail. Elle me dit qu’il n’y a pas de discrimination à l’embauche mais que cela restreint le nombre de postes possibles. Il y a plus de 8% de la population qui est concernée, beaucoup ont du travail et vivent bien.
Tamiru m’a décrit une situation très préoccupante à la clinique du VTPC confirmant le rapport de Mekdim. Les enfants se plaignent du manque d’écoute, du manque de disponibilité et de la faible qualité des soins apportés. Il me décrit une situation inquiétante dans la délivrance des médicaments pour les enfants HIV, un manque d’impartialité et une absence d’écoute.
Ato Tamiru souhaite que la formation Mekdim profite à tous, aux salariés comme aux enfants malades ou pas.
Projet MEKDIM le domaine d’intervention de MEKDIM , ONG Éthiopienne, se situe auprès des populations touchées par le sida.
Cette ONG a été contactée en 2021 afin de mener un audit auprès du staff et des jeunes HIV + de Burrayou, afin d’améliorer la prise en charge des enfants HIV+, au point de vue médical et psychologique . Une collaboration s’engage dorénavant avec cette association suite à leur rapport de juillet dernier. ( 59 jeunes et enfants sont concernés)
L’objectif de notre groupe est de collecter le ressenti, l’implication et l’envie du staff et des jeunes par rapport au projet Mekdim.
Après une petite visite rapide, nous rencontrons le staff. (Tamiru, Eyejigayehu, Talila,Dembele,Tadele,Kasso et Sereke Behran)
Nous avons demandé à Solomon de traduire pour ne pas passer par l’anglais et cela s’avérera confortable et efficace surtout dans la rencontre avec les jeunes.
Nous demandons l’avis de tous, ils s’expriment librement et sont globalement du même avis et positifs. Ils font de leur mieux pour accompagner et soutenir les enfants mais ils pensent qu’une aide apportée de l’extérieur serait bénéfique et leur permettrait de se confier plus librement. L’équipe exprime également le sentiment de manquer d’outils pour intervenir et tout le monde se montre intéressé par les formations proposées par Mekdim. Nous sommes donc rassurés sur le vécu de l’équipe quant à une future intervention de Mekdim à Burayu. Celle-ci n’est pas vécue de manière intrusive et tous semblent prêts à adhérer au programme. Toutefois, il a été difficile d’aborder la question de l’accès à la contraception pour les filles qui en auraient besoin. La question de la vie affective et sexuelle des jeunes reste plus que taboue et n’est pour l’instant pas abordable. Nous espérons que Mekdim saura l’amener avec prudence. Tamiru nous dira plus tard qu’ils ne ferment pas les yeux sur ces questions, mais qu’ils se doivent de « contenir » les jeunes filles et garçons qui partagent le même lieu de vie: la vie affective n’a pas lieu d’être à Burayu.
La rencontre avec les enfants qui ont eu un entretien avec Mekdim lors de l’audit a donné le même résultat positif, les jeunes sont en demande et très intéressés. Ils se sont ouverts et nous ont décrit une situation très préoccupante à la clinique avec la disparition de médicaments, un manque d’organisation et de suivi. Certains jeunes en sont arrivés à s’autogérer pour la prise des médicaments pour être surs de les avoir en temps et en heure. ….. Ils sont furieux de cette situation.
En résumé le bilan concernant Mekdim est très positif tant pour les jeunes que pour le staff, mais les échanges que nous avons eu sur place ont mis en avant des gros dysfonctionnements dans l’organisation des soins à Burayu.
Réunion avec Mekdim dans leurs locaux d’Addis. Sont présents Ato Menelik N°2 de Mekdim, Ato Wondossen et W° Alemtseghaye.
Nous leur faisons part des réactions collectées la veille et entamons toute une série de questions d’ordre pratique sur le déroulement du projet, comme le timing, la façon d’évaluer les enfants les protocoles de mise en place des actions et des formations, les modalités de paiement, leur capacité à aider les jeunes et SOSEE par la suite, la taille de notre projet par rapport à ce qu’ils gèrent d’ordinaire, etc …
Les réponses fusent des trois personnes présentes, les pratiques et les protocoles sont les mêmes que chez nous avec le même objectif d’arriver à une charge virale indétectable.
L’aspect contraception et information par rapport à la sexualité est abordé avec une pudeur et une retenue toute éthiopienne, ils ont bien compris que notre problématique est un peu particulière du fait que nos enfants sont orphelins.
Nous sommes sortis convaincus de leur compétence et de leur maîtrise du sujet. Le programme pourrait démarrer un mois environ après la signature du projet….
Rencontre avec les filles qui sont en formation au collège (elles n’ont pas eu assez de points après l’examen du grade 12 pour aller à l’université). Elles étudient le tourisme, la comptabilité, etc
Elles sont 9: Addis Alem, Lezebu,Meskerem,Soleana, Bethleem, Misrak, Meheret, Mehaza, Shekurit
Elles ont préparé leur entretien correctement et c’est très intéressant, nous sommes toujours impressionnes par l’intelligence de ces jeunes. Les sujets sont divers et variés :
Le fait que l’on ne leur donne que deux culottes et deux soutiens gorges par an.
Elles demandent à avoir l’accès aux machines à coudre inutilisées de la coopérative pour occuper leur temps libre.
Elles nous disent ne pas être traitées par l’administration comme les garçons, tout va moins vite car elles sont moins virulentes dans leurs échanges avec le staff.
Elles demandent la revalorisation des 13000 birrs lorsqu’elles quitteront les Foster Families et demandent une petite aide pendant trois mois au départ au lieu des six mois qui étaient donnés par le passé
Elles évoquent la difficulté du passage des COC (examens pratiques du gouvernement pour valider les formations dans les écoles privées). Sans réussite du COC, la formation ne vaut rien.:problème des écoles privées qui ont laissé les jeunes passer dans la classe supérieure sans passer le COC au fur et à mesure chaque année. Le covid n’a pas permis le passage des examens au fil de l’eau.
Elles demandent des valises en bon état pour ranger leurs affaires dans les Foster families , les leurs sont mangées par les rats ou les souris. On pense à des bacs plastiques.
Elles souhaitent ne plus rester en Foster Families jusqu’au bout mais passer par une phase maison louée pour monter en autonomie, .car elles n’ont pas assez d’autonomie en FF.
Rencontre avec les plus grands qui sont encore dans l’orphelinat pour des raisons de santé (enfants porteurs du HIV ou sourds et muets), toujours sous la traduction de Solomon en qui les jeunes ont toute confiance, il y a 20 jeunes dont 6 filles.
Les premières demandes concernent les vêtements et les chaussures en trop petit nombre
Les mêmes critiques concernent les services de santé
Il n’y a pas de problème avec la nourriture qui est suffisante mais pas variée et toujours au même moment dans la semaine. Ils aimeraient un peu de fantaisie et de changement dans les menus. Ils réclament plus de lait et plus de fruits.
Ils n’ont plus assez d’argent de poche pour payer leur sport comme le foot (200 birrs par mois) ou le cirque (500b)
Simon qui est sourd et muet demande un ordinateur portable pour continuer ses études en informatique.
Les jeunes réclament de pouvoir regarder le foot à la télé
Eyejigayehu nous annonce qu’elle va bientôt avoir 63 ans et qu’elle souhaite prendre sa retraite. Sa décision est motivée par sa santé et son âge. ..Nous ne retrouverons jamais quelqu’un comme elle.
Samedi toute la journée à Burayu pour déballage des valises et distribution dans la foulée. Maria a ramené des bonnets en laine qui font un tabac. Nous avons pu ramener six valises de 23 kilos
Le dernier jour est consacré à une entrevue avec Tamiru pour convenir des suites à donner de notre passage
En conclusion, cette mission d’une semaine s’est très bien passée avec le concours de Passerelle. Ce fut un plaisir de se retrouver ensemble sur place comme par le passé. Nombre de nos problèmes sur place ne pourrons se résoudre que si nous retrouvons des financements supplémentaires. Le centre fonctionne au ralenti faute de moyens et cela entraîne des répercussions directes sur la vie des jeunes. Rien n’est gaspillé ou mal utilisé. Tamiru pilote à vue, au mieux, de ce qui peut être fait.